Notre petite Zoé est née le 12 décembre 2012 après un éprouvant parcours de procréation médicalement assistée.
12-12-12 : une date exceptionnelle pour une petite fille exceptionnelle.
Ma grossesse s'est déroulée normalement, bien qu'elle ait été très stressante et angoissante pour diverses raisons. Dès le cinquième mois, j'ai été particulièrement surveillée car notre bébé était en dessous de toutes les courbes. Ce ne sont donc pas les échographies qui ont manqué... pour autant la microphtalmie n'a jamais été décelée, les yeux n'ayant jamais été mesurés.
La petite crevette attendue faisait à la naissance 3,710 kg et 50,50 cm... beaucoup de stress pour rien et un grand soulagement... de courte durée. Après sa naissance, nous remarquons que son œil droit refuse de s'ouvrir. Les sages-femmes nous rassurent et mettent ça sur le compte de l'accouchement, nous disant que son œil s'ouvrira très rapidement. Le troisième jour, son œil ne s'ouvrant toujours pas, j'en parle au pédiatre qui organise un rendez-vous avec un ophtalmologiste de l'hôpital. Celui-ci rencontrera Zoé le jour-même, mais n'est pas assez équipé pour émettre un diagnostic. Il me confirme qu'il y a bien une anomalie mais ne sait me dire quoi. Nous sommes vendredi, il me demande de repasser le lundi pour lui faire un fond d'oeil. Nous resterons donc deux jours dans l'angoisse, sans savoir ce qu'a notre poupée.
Le lundi, nous retournons donc à l'hôpital pour faire le fond d'oeil. Très vite, le diagnostic tombe : notre fille a une microphtalmie de l'oeil droit, elle ne verra pas de cet œil. L'ophtalmologiste nous laisse en nous demandant dix fois si nous avons des questions. Nous sommes tellement sous le choc que nous ne savons que répondre. Et puis, je l'entends dire à son collègue qu'il n'a vu des cas de Zoé que « dans les livres ». Ma seule pensée est alors qu'il ne touchera plus jamais notre fille... La seule chose rassurante qu'il ait pu nous dire était que son œil gauche allait très bien.
Suite à ce diagnostic, je demande à rencontrer une pédiatre qui nous connaît bien, car elle a suivi nos aînés (des jumeaux, nés prématurément à 29 semaines de grossesse). En effet, ayant perdu notre fille aînée à 24 jours de vie, suite à sa prématurité, je n'ai qu'une angoisse : que les jours de Zoé soient en danger. La pédiatre nous rassure rapidement, notre poupée a l'air d'aller très bien. Néanmoins, une IRM cérébrale est rapidement fixée pour faire un état des lieux.
En rentrant à la maison, je fais ce que l'on nous déconseille régulièrement de faire : je tape « microphtalmie » dans un célèbre moteur de recherche. Je tombe d'abord sur la page Wikipedia qui m'a inquiétée. Puis je tombe sur un premier forum, où je lis des témoignages plutôt rassurants. Ensuite, je tombe sur le forum créé par Laëtitia, sur lequel je décide de m'inscrire. Mais je ne trouve pas le courage de poster tout de suite. Pourtant, les divers témoignages que je lis sont plutôt encourageants. En tout cas, je comprends qu'il faut que je prenne très vite rendez-vous dans un centre de référence. Habitant à 50 km de Paris, je contacte tout d'abord la Fondation Rotschild. Nous sommes le 19 décembre, on m'annonce un délai d'attente de 9 mois... on repassera pour une prise en charge rapide. J'appelle ensuite l'hôpital Trousseau, qui m'annonce des rendez-vous pour juin 2013. C'est mieux, mais si loin... Du coup, j'appelle Necker, là les rendez-vous tombent au mois de mai. Je m'effondre en larmes au téléphone, étant en plein baby blues (Zoé a une semaine), découragée et désespérée de tant d'attente. Je raconte alors notre histoire à la secrétaire, qui, émue, appelle un ophtalmologiste qui passait devant elle au même moment. Le médecin accepte alors de nous recevoir le lendemain, jeudi 20 décembre 2012. Serait-ce le miracle de Noël ?
Nous arrivons donc le lendemain à l'hôpital Necker pour notre premier rendez-vous. Je ne saurais décrire les sentiments qui m'envahissent : toujours du stress, de l'angoisse, mais je me sens rassurée aussi, que Zoé soit prise en charge par des spécialistes pour qui notre fille ne sera pas un cas d'école.
La pauvre puce aura donc de nouveau droit à un fond d'oeil, le deuxième en 4 jours. Le diagnostic est le même que celui annoncé quelques jours plus tôt. Malgré tout, l'annonce est différente, les deux ophtalmologistes qui ont regardé les yeux de Zoé se veulent rassurants, notre fille va bien, elle pourra très bien vivre avec une vision monoculaire. On nous demande de réaliser un bilan malgré tout (une IRM cérébrale, une échographie cardiaque, une échographie des reins, et une prise de sang pour tester le fonctionnement de l'hypophyse). On nous conseille également de rencontrer très rapidement un oculariste pour la prise en charge esthétique de la microphtalmie qui a l'air importante.
C'est ce jour-là que je trouve le courage d'aller témoigner sur le forum, et de m'inscrire sur le groupe privé de Facebook, qu'une amie a trouvé en recherchant des informations sur la malformation de Zoé. Je me sens alors tellement moins seule !
Fin décembre, Zoé a sa prise de sang et passe son IRM. Courant janvier, elle passe ses deux échographies. Tous ces examens reviendront normaux, ce qui nous a beaucoup rassurés. Parallèlement, nous voyons notre fille grandir, s'éveiller un peu plus chaque jour, ce qui nous redonne confiance aussi.
Le 2 février, nous avons notre premier rendez-vous chez l'oculariste. Nous sommes très bien reçus, l'ensemble du personnel est très humain, très attentif. L'oculariste de Zoé est bienveillant, rassurant aussi. Il nous dit tout de suite que sa microphtalmie est entre sévère et marquée (donc moins importante que diagnostiquée par Necker, mais en même temps, l'ophtalmologiste avait vu Zoé à 8 jours de vie, il était donc très difficile de lui ouvrir l'oeil...). Cela ne change rien au diagnostic visuel bien sûr, mais c'est de bon pronostic pour la prise en charge esthétique. Notre oculariste nous dit donc que nous avons le temps avant de poser la première prothèse, mais que nous pouvons commencer rapidement si nous le souhaitons, car, paradoxalement, l'oeil de Zoé étant « gros », elle risque de ne pas supporter sa prothèse, il faudrait donc passer par une opération (un recouvrement de cornée) pour qu'elle puisse la tolérer. Rendez-vous est donc pris le 19 février pour une première prise d'empreinte (impressionnant mais non douloureux normalement, juste désagréable et surtout très rapide). Le 25 février, à l'âge de 2 mois et demi, on pose à Zoé sa lentille transparente, qui servira au test de tolérance. Le 28 février, nous avons notre deuxième rendez-vous chez l'ophtalmologiste de Necker, qui nous confirmera que Zoé tolère très bien sa lentille et que son œil gauche fonctionne toujours bien.
Depuis le 9 mars, Zoé porte donc sa toute première prothèse peinte, et cela se passe très bien. Elle n'a pas pleuré pendant la pose, s'est juste un peu frotté l'oeil, telle une prise de conscience de ce corps étranger, mais c'est tout.
Nos sentiments ont été très mitigés à la pose de cette prothèse. Nous nous étions habitués à notre fille telle qu'elle était, elle était déjà la plus belle. Mais cette prothèse lui ouvre vraiment le regard et c'est vrai que cela change vraiment ! D'ailleurs, les avis extérieurs sont très positifs : la prothèse ne se voit pas, le résultat est très beau.
Nous passerons à la deuxième prothèse fin mars. L'oculariste nous parle de 4 ou 5 prothèses pour pouvoir rattraper la différence entre les deux yeux. D'ici trois ou quatre mois, la prise en charge esthétique sera derrière nous. Un pas de plus franchi dans le parcours de microphtalmie.
Depuis le mois de mars, je fais partie du conseil d'administration de l'association Microphtalmie France. Un engagement qui me tenait à cœur, l'association nous ayant tellement apporté, tant au niveau des informations, des conseils, mais aussi du soutien... Il y a toujours une oreille attentive en cas de besoin, une solidarité sans faille... dans une société souvent individualiste, cela fait un bien fou.
Chaque jour, nous réalisons la chance que nous avons dans notre « malheur ». La prise en charge a été rapide et sérieuse à tous les plans, notre petite fille va bien. Bien sûr, chaque rendez-vous chez l'ophtalmologiste sera toujours angoissant, puisqu'il s'agira de contrôler que son œil fonctionnel continue de bien voir. Et toute notre vie, nous craindrons pour son œil fonctionnel, c'est certain.
Mais notre fille ne pouvait porter un meilleur prénom. Zoé signifie « la vie » en grec. Elle est notre miracle, et de vie, elle en est pleine. Elle est tout simplement parfaite.